Comment isoler les murs et toitures d’un entrepôt existant pour le transformer en bureaux passifs ?

Isoler les parois d’un entrepôt transformé en bureaux

Les nouveaux locaux du bureau d’études écoRce à Liège.

Un entrepôt situé à Liège a été transformé en bureaux. Le maître de l’ouvrage souhaitait atteindre les valeurs du standard passif. Quelles solutions a-t-il adoptées pour isoler les parois extérieures ?


Introduction

Le bâtiment a été réalisé à partir d’un entrepôt existant en pleine ville de Liège à proximité de la gare des Guillemins. Il a été conçu en 2013 par le bureau d’architecture FHW Architectes et le bureau d’études écoRce sprl qui est également le maître de l’ouvrage.

L’extérieur du bâtiment avant les travaux.

L’intérieur du bâtiment avant les travaux.

Il a été complètement transformé. Seule la structure en béton et les murs mitoyens ont été maintenus. Le bâtiment peut donc être considéré comme une construction neuve dans le cadre de la réglementation PEB. Les éléments conservés ont provoqué des contraintes qui ont dû être résolues notamment en matière d’isolation de l’enveloppe.

Le bâtiment compte, après travaux, trois niveaux.

  • Au rez-de-chaussée accessible depuis une cour intérieure d’îlot, se trouvent l’accueil, une salle de réunion et les sanitaires. Un carport occupe une partie de ce niveau. Il abrite une zone de parking pour vélos et une zone de tri pour les déchets.
  • Le premier étage, est occupé par des bureaux paysagés, une salle de réunion ainsi qu’un petit local réservé à l’impression et à la copie des documents.
  • Le deuxième étage est réservé à la détente : réfectoire, cuisine, terrasse et jardin.

Plans du projet (document architecte).

Le maître de l’ouvrage avait pour objectif de limiter au maximum les besoins d’énergie de façon à en réduire les consommations. Il concentra donc, entre autres, ses efforts sur la réduction des déperditions thermiques tant par transmission à travers les parois de l’enveloppe du volume protégé que par manque d’étanchéité à l’air de celles-ci.


Respect des exigences Q-ZEN

L’analyse du bâtiment à l’aide du logiciel PEB montre que celui-ci répondait déjà lors de sa conception aux exigences Q-ZEN de la réglementation qui devront être respectées en 2021.

Le nouveau bâtiment a comme fonction bureaux.
Il ne comporte qu’un seul volume protégé, une seule unité PEB, une seule zone de ventilation et deux parties fonctionnelles :

  • une partie fonctionnelle “bureaux” qui occupe la totalité du rez-de-chaussée et du 1er étage ;
  • une partie fonctionnelle “rassemblement – cafétéria/réfectoire” au 2e étage.

Les conditions à respecter pour que le bâtiment respecte les exigences Q-ZEN 2021 en Région wallonne sont les suivantes :

  1. Respecter les Umax.
  2. Ne pas dépasser le niveau K maximum en tenant compte de l’impact des nœuds constructifs.
  3. Ne pas dépasser le niveau EW maximum spécifique au bâtiment concerné.
  4. Respecter les règles de ventilation décrites dans l’annexe C3 de l’AGW du 15/05/2014 tel que modifié par l’AGW du 15/05/2016.
  5. Installer un comptage énergétique pour chaque unité PEB.

1. Respect des Umax

Comme il s’agit d’une transformation, même si le bâtiment n’est pas très grand, le nombre de parois différentes est élevé.

Le tableau ci-dessous montre que cette exigence a été respectée partout.

Nom de la paroi U (W/m²K) Umax (W/m²K)
Fenêtres 0.74 1.50
Vitrage fenêtres 0.50 1.10
Fenêtre de toiture 1.36 1.50
Vitrage fenêtre de toiture 1.10 1.10
Toiture sur 1er étage 0.09 0.24
Toiture sur 2ème étage 0.08 0.24
Mur isolé par l’intérieur 0.23 0.24
Mitoyen non bâti côté voisin 0.12 0.24
Mur extérieur 0.18 0.24
Façade bureau 0.13 0.24
Autres façades 0.19 0.24
Pied de façade 0.22 0.24
Dalle sur sol 0.09 0.24
Dalle sur extérieur 0.08 0.24
Porte 1.00 2.00
Mitoyens bâtis côté voisins < 0.63 1.00

2. Respect du critère K ≤ K35

Le bâtiment répond largement à ce critère malgré les difficultés inhérentes à ce type de travaux (transformation). Le niveau K calculé est K20.

3. Respect du critère EW ≤ (90/45)

Le niveau EW calculé est de EW38 < EW45 qui est l’exigence la plus sévère pour les bâtiments non résidentiels. Le critère est donc clairement respecté.

4. Respect des règles de ventilation

La ventilation du bâtiment est assurée par un système D grâce à une centrale double flux avec récupération de chaleur. Le choix de cette centrale de traitement d’air s’est fait suite au calcul du débit nécessaire dans ce bâtiment conformément à l’annexe C3 de l’AGW du 15/05/2014 tel que modifié par l’AGW du 15/05/2016. Elle répond donc aux exigences PEB Q-ZEN de 2021.

La centrale double flux, qui se situe dans un local technique intérieur, a un rendement de 85 % et assure un débit de 1 556 m³/h qui sera distribué dans l’ensemble du bâtiment.

5. Respect de la règle de comptage énergétique.

Le bâtiment ne compte qu’une seule unité PEB. Cette règle est donc très facile à respecter puisque la présence des compteurs des sociétés distributrices (gaz et électricité) suffit.

Des compteurs électriques supplémentaires ont été placés pour mesurer :

  • la consommation du groupe de ventilation ;
  • la production de l’installation photovoltaïque (1 700 Wc) ;
  • la consommation de l’éclairage.

Le respect des exigences a été permis, entre autres, par ne niveau d’isolation thermique des différentes parties de l’enveloppe du volume protégé.


Les parois de l’enveloppe du volume protégé

Comment sont isolées les parois extérieures neuves et existantes ?

Coupe de localisation des détails (document architecte).

  1. Mur existant isolé par l’extérieur
  2. Toiture existante isolée par l’extérieur et végétalisée
  3. Nouveau mur à ossature bois
  4. Nouvelle toiture compacte
  5. Nouveau mur isolé par l’intérieur et l’extérieur
  6. Mur extérieur existant isolé par l’intérieur
  7. Sol existant isolé par le haut

1. Un mur existant isolé par l’extérieur

La façade avant a été partiellement conservée et isolée par l’extérieur. L’isolant est protégé par un bardage en bois. L’isolation thermique d’un bâtiment existant par l’extérieur réduit considérablement les risques de ponts thermiques et de condensation interstitielle, le pare-pluie extérieur étant très perméable à la vapeur d’eau.

Coupe mur existant isolé par l’extérieur (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.14 W/m²K en partie courante et 0.11 W/m²K à l’endroit de la structure en béton où l’épaisseur d’isolant est plus importante pour des raisons technologiques.

Calcul du U des parties courantes à l’aide du logiciel PEB.

Calcul du U des parties situées devant les poutres en béton à l’aide du logiciel PEB.


2. Toiture existante isolée par l’extérieur et végétalisée

La toiture plate existante a été isolée selon le principe de la toiture chaude. L’isolant est posé au-dessus de la dalle en béton. La membrane d’étanchéité bitumineuse existante a été conservée. Elle contribue à la protection de l’isolant assurée par le nouveau pare-vapeur contre la vapeur d’eau provenant de l’intérieur du bâtiment. Une nouvelle membrane d’étanchéité en EPDM est posée sur l’isolant. Elle lestée par une toiture verte extensive.
Cette technique est courante. Elle ne pose pas de problème de condensation interstitielle et permet d’éviter les ponts thermiques.

Coupe toiture existante isolée par l’extérieur et végétalisée (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.09 W/m²K.
Le faux plafond acoustique n’a aucun impact sur la performance thermique de la paroi.
Le lestage que constitue la couche végétalisée n’a pas été pris en compte. Son influence sur le U est négligeable en comparaison de celle de la couche d’isolant. Elle protège cependant la membrane d’étanchéité du rayonnement direct extérieur.

Calcul du U des toits existants isolés par l’extérieur à l’aide du logiciel PEB.


3. Nouveau mur à ossature bois

La façade à ossature bois permet la pose d’une grande épaisseur d’isolant sans augmenter exagérément l’épaisseur de la paroi elle-même, celui-ci étant posé à l’intérieur de la structure. La structure interrompt la couche isolante. L’impact de celle-ci sur les performances thermiques est pris en compte dans le calcul.
Autant que possible la paroi est composée d’éléments de plus en plus ouverts à la diffusion de vapeur de l’intérieur vers l’extérieur de manière à se prémunir contre la condensation à l’intérieur du mur.

Ainsi, le pare-vapeur  situé du côté chaud de l’isolant sera le plus étanche possible à la vapeur d’eau en hiver et le pare-pluie situé du côté froid de l’isolant sera, par contre, le plus perméable possible à celle-ci.
Le pare-vapeur aura une perméabilité à la vapeur d’eau variable en été et en hiver. En été il sera plus ouvert à la vapeur pour permettre à la paroi de sécher. C’est ce que l’on appelle un freine vapeur à µ (sd) variable.
L’auteur de projet a pris en compte le comportement hygrométrique de la paroi de manière à s’assurer de la pérennité du bâtiment. Il a réalisé une simulation dynamique à l’aide du logiciel WUFI® afin de valider la paroi du point de vue de la diffusion de vapeur d’eau.

Coupe nouveau mur à ossature bois (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.13 W/m²K.
Les deux couches d’isolant ont été considérées comme une seule couche dans le calcul, L’isolant étant identique et les structures en bois occupant les mêmes proportions d’espace.

Calcul du U de la façade à ossature bois à l’aide du logiciel PEB.


4. Nouvelle toiture compacte

La toiture compacte désigne la toiture plate dont l’isolant est placé à l’intérieur du support en bois sans lame d’air entre les différentes couches. Un écran pare-vapeur étanche à l’air doit être placé sous le support. Ce n’est pas une toiture froide, car il n’y a pas de couche d’air ventilée au-dessus de l’isolant. Cette technique est délicate à cause des risques de condensation interne.

Principe de fonctionnement : séchage par utilisation de freine-vapeurs hygrovariables.

  • En hiver, la pression de la vapeur dans les locaux est généralement supérieure à celle régnant dans le complexe toiture, ce qui crée un flux de vapeur se déplaçant de bas en haut.
  • En été, cette diffusion de vapeur est inversée : de haut en bas.
  • On suppose que l’action du freine-vapeur assèche le complexe toiture durant les périodes plus chaudes tandis que l’apparition d’humidité peut être limitée dans les périodes plus froides grâce à la fermeture du freine-vapeur.

Certaines règles doivent être respectées.

  • L’étanchéité doit absorber le plus possible les rayonnements solaires.
  • La toiture doit être totalement ensoleillée.
  • La pente doit être d’au moins 2 % (pas de stagnation d’eau pluviale).
  • La pente ne peut pas être de plus de 40° pour des versants orientés vers le Nord, l’Est et l’Ouest.
  • L’isolant doit être très ouvert à la vapeur (µ le plus petit possible)
  • Le freine-vapeur doit être du type hygrovariable.
  • La finition intérieure sous le freine-vapeur doit être perméable à la vapeur.
  • Il faut éviter toute convection entre l’air intérieur et le complexe de toiture (blower door test).
  • Le taux d’humidité du bois doit être limité avant la mise ne place du système.
  • La classe de climat intérieure ne peut pas dépasser la classe III ou même la classe II lorsque la toiture est végétalisée.

Le maître de l’ouvrage (bureau d’études spécialisé dans ce domaine) a réalisé des simulations hygrothermiques pour évaluer le risque d’apparition de problème d’humidité dans la toiture compacte de son bâtiment. C’est une tâche délicate, car il y a énormément de paramètres inconnus à entrer et il est souvent très difficile d’interpréter correctement les résultats finaux.

Deux solutions ont été envisagées.

Les deux solutions analysées par des simulations hygrothermiques.

La simulation hygrothermique a clairement montré que c’est la solution B qui devait être adoptée.

Coupe nouvelle toiture compacte (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.08 W/m²K.

Malgré que l’épaisseur d’isolant soit plus importante que celle de la toiture présentée plus haut au point 2, le U atteint est proche. Cela est dû aux caractéristiques des matériaux utilisés.

Calcul du U de la toiture compacte à l’aide du logiciel PEB.


5. Nouveau mur mitoyen isolé par l’intérieur et l’extérieur

Pour que le mur mitoyen neuf donnant sur l’air extérieur soit thermiquement le plus performant possible tout en n’empiétant pas trop sur l’espace intérieur, il a été isolé à la fois par l’intérieur et l’extérieur.
Le maître de l’ouvrage a réalisé des simulations hygrothermiques pour évaluer le risque d’apparition de problème d’humidité dans ce mur. Les résultats furent rassurants.

Coupe nouveau mur mitoyen isolé par l’intérieur et l’extérieur (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.12 W/m²K.

Calcul du U du mur mitoyen isolé par les deux côtés à l’aide du logiciel PEB.


6. Un mur existant isolé par l’intérieur

Isoler un mur existant par l’intérieur est, dans certains cas, la seule solution possible bien que la gestion des ponts thermiques et des condensations internes soit délicate.
Le maître de l’ouvrage après avoir réalisé quelques simulations dynamiques a opté pour la solution ci-dessous.

Coupe mur existant isolé par l’intérieur (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.23 W/m²K. Nous sommes toujours en-dessous de Umax =  0.24 W/m²K pour un mur extérieur.

Calcul du U du mur extérieur isolé par l’intérieur à l’aide du logiciel PEB.


7. Sol existant isolé par le haut

Comme dans bien des cas, la solution la plus économique pour isoler un plancher posé sur le sol est de poser l’isolant sur la dalle en béton existante et de tirer une nouvelle chape armée sur l’isolant.
C’est la technique qui a été choisie.

Coupe plancher sur sol existant isolé par le haut (document architecte).

Le calcul du coefficient de transmission thermique U réalisé à l’aide du logiciel PEB indique une valeur U = 0.14 W/m²K.

Calcul du U de la dalle sur sol isolée par le haut à l’aide du logiciel PEB.


Informations complémentaires

Cette étude de cas a été développée à l’aide des informations et documents fournis par le bureau d’architecture ayant conçu le bâtiment FHW Architects et le maître de l’ouvrage écoRce sprl dans le cadre de l’action Bâtiments exemplaires Wallonie 2013.