Calcul des déperditions et dimensionnement des installations de chauffage    Calcul des déperditions et dimensionnement des installations de chauffage


Préambule 

L’article que vous vous apprêtez à lire, publié en 2007, constitue un témoignage précieux des méthodes de calcul des déperditions thermiques qui ont prévalu pendant des décennies. Basé sur la norme NBN EN 12831 de 2003, il expose une approche rigoureuse et méthodique qui a longtemps servi de référence pour le dimensionnement des installations de chauffage. Cependant, en moins de vingt ans, le monde de la thermique du bâtiment a connu une révolution sans précédent, portée par la digitalisation, l’intelligence artificielle et l’urgence climatique. Ce préambule a pour objectif de contextualiser cet article historique et de vous présenter les nouvelles approches qui redéfinissent aujourd’hui la manière dont nous concevons et dimensionnons les systèmes de chauffage.

La Fin du Calcul Statique : L’Ère de la Simulation Dynamique

La méthode de calcul présentée dans l’article, bien que détaillée, repose sur une approche statique. Elle fige le temps en considérant des températures de base et des conditions stables. Or, un bâtiment est un organisme vivant, qui interagit en permanence avec son environnement. La révolution numérique a permis de passer de ce calcul statique à la Simulation Thermique Dynamique (STD). Des logiciels comme TRNSYS, Lesosai ou IESVE modélisent le comportement du bâtiment heure par heure, voire minute par minute, en intégrant les variations climatiques, les apports solaires, les gains internes et l’inertie des matériaux. Le dimensionnement n’est plus une simple photo, c’est un film qui anticipe la performance réelle du bâtiment.

L’Intelligence Artificielle au Service de la Précision

Le calcul manuel des déperditions, qualifié de “fastidieux” dans l’article, est aujourd’hui assisté, voire remplacé, par l’intelligence artificielle. Des algorithmes sont capables d’analyser les plans d’un bâtiment, d’identifier les ponts thermiques, de quantifier les surfaces déperditives et de calculer les déperditions avec une précision et une rapidité inégalées. Le Building Information Modeling (BIM), maquette numérique du bâtiment, devient le support de cette intelligence. Les données du BIM sont directement exploitées par les moteurs de calcul, éliminant les erreurs de saisie et permettant des optimisations itératives en temps réel.

Des Données Climatiques Évolutives

L’article se réfère à des données climatiques datant de 1986. Le changement climatique a rendu ces données obsolètes. Les nouvelles méthodes de calcul intègrent des fichiers météorologiques prospectifs, qui simulent l’évolution du climat sur les décennies à venir. Le dimensionnement ne vise plus seulement à garantir le confort en hiver, mais aussi à prévenir la surchauffe en été, enjeu majeur des bâtiments de demain.

Du Dimensionnement à l’Optimisation

L’objectif n’est plus seulement de “couvrir les déperditions”, mais d’optimiser la performance globale du bâtiment. Le calcul des déperditions n’est qu’une étape d’un processus de conception intégrée. On ne dimensionne plus un système de chauffage, on conçoit un système énergétique complet, qui intègre la production, le stockage et la distribution de l’énergie. Les pompes à chaleur, les systèmes hybrides, le solaire thermique et photovoltaïque sont autant de technologies qui doivent être dimensionnées et orchestrées de manière optimale.

Un Cadre Normatif en Constante Évolution

La norme EN 12831 a été mise à jour en 2017, et de nouvelles réglementations, comme la RE2020 en France, ont profondément modifié les exigences de performance. Ces nouvelles réglementations ne se contentent plus de fixer des limites de consommation ; elles imposent une analyse du cycle de vie du bâtiment, de sa construction à sa démolition. Le calcul des déperditions s’inscrit désormais dans une approche globale de l’impact environnemental du bâtiment.
L’article qui suit est une excellente introduction aux principes fondamentaux du calcul des déperditions. Il vous donnera les bases pour comprendre les phénomènes de transmission et de ventilation qui régissent la thermique du bâtiment. Mais gardez à l’esprit que les outils et les méthodes ont changé. Le calcul des déperditions est passé de l’ère de la règle à calcul à celle de l’intelligence artificielle. Ce préambule vous invite à lire cet article avec un regard critique, en mesurant le chemin parcouru et en appréciant la révolution technologique qui a transformé un calcul complexe en une science de l’optimisation et de la simulation.

Norme NBN EN 12831 (2003) et NBN B62 – 003

Norme NBN EN 12831 : 2003

La norme NBN EN 12831 : 2003 (Systèmes de chauffage dans les bâtiments – méthode de calcul des déperditions calorifiques de base) permet tant de calculer les déperditions calorifiques d’un bâtiment (dimensionnement des systèmes de chauffage) que d’un local (dimensionnement des corps de chauffe).

Méthode de calcul

La méthode de calcul est assez complexe.
En résumé, sur base de la détermination :

  • des données climatiques (températures externes données par la NBN B 62 – 003 en fonction de la situation géographique) ;
  • de la définition des espaces du bâtiment et de leur température interne (espaces chauffés, non chauffés hors gel, …) ;
  • et des données relatives au bâtiment comme les dimensions (surface d’échange de chaleur avec l’extérieur) et la composition des parois externes (valeur U en W/m².K) ;

le calcul détermine chacune des grandeurs suivantes :

  • Les déperditions de base perdue par transmission. Elles dépendent de la surface de toutes les parois du bâtiment entourant le volume chauffé, du coefficient de transmission thermique de celles-ci et des températures intérieures et extérieures correspondant à chaque local. On retrouve ce type de déperdition au travers :
    • de l’enveloppe du bâtiment ;
    • des espaces non chauffés ;
    • des espaces adjacents ;
    • du sol.
  • Les déperditions de base par ventilation. C’est la chaleur perdue par renouvellement d’air du bâtiment qui dépend du taux de ventilation et de l’inétanchéité du bâtiment. Pour simplifier, la norme propose de déterminer ceux-ci en connaissant le volume chauffé et en choisissant un taux de renouvellement d’air forfaitaire.

À ces déperditions de base (W), la méthode de calcul ajoute une surpuissance de relance lorsque le bâtiment est soumis à l’intermittence (coupure du chauffage de nuit).

Norme NBN B 62 – 003

Validité

La norme NBN B 62 – 003 est une norme qui date de 1986. Elle est totalement remplacée par la norme NBN EN 12831 : 2003.

De cette norme, on a principalement repris les températures extérieures de base qui sont propres au climat belge.

Température externe

Les installations de chauffage sont dimensionnées pour fournir un confort adéquat lorsque les conditions atmosphériques extrêmes. Ces dernières sont symbolisées dans la norme par la température extérieure de base. Il s’agit de “températures extérieures moyennes journalières qui, en moyenne, ne sont dépassées vers le bas que pendant un seul jour par an”. Elles sont données dans la norme en fonction de chaque commune de Belgique et doivent donc servir de référence pour le dimensionnement.

Températures extérieures minimales de base, en Wallonie.


Quelques données de base

Températures internes de base

Les températures internes  de base sont fonction de l’activité menée dans les différents locaux repris ci-dessous.

Type de bâtiment ou d’espace θint,i
°C
Bureau individuel
Bureau paysager
Salle de réunion
Auditorium
Cafétéria/Restaurant
Salle de classe
Crèche
Magasin
Résidentiel
Salle de bainÉglise
Musée/Galerie
21
21
21
21
21
21
21
16
21
2415
16

Taux de renouvellement d’air

Le taux de renouvellement d’air est le nombre de renouvellements en volume/heure du bâtiment lorsqu’il est mis en surpression de 50 Pa. Cette valeur est déterminée, par exemple, lors d’un test de “blower door”).

Construction Taux de renouvellement d’air pour le bâtiment entier, n50
 h-1
Degré d’étanchéité à l’air de l’enveloppe du bâtiment
(qualité des joints de fenêtre)
Élevé
(joints des fenêtres et portes de haute qualité)
Moyen
(fenêtres à double vitrage, joints normaux)
Bas
(fenêtres à simple vitrage, pas de joints)
Maisons individuelles < 4 4 – 10 > 10
Autres logements ou bâtiments < 2 2 – 5 > 5

Surpuissance de relance

La surpuissance de relance dépend de plusieurs facteurs :

  • Le temps de relance.
  • La chute de température lors de l’intermittence de 12 heures. Plus le bâtiment est isolé et étanche, moins grande sera la chute de température et, par conséquent, moins grande sera la surpuissance de relance.
Temps de relance frh
W/m²
Chute prévue de la température intérieure lors du ralenti
2K 3K 4K
Inertie du bâtiment Inertie du bâtiment Inertie du bâtiment
faible moyenne forte faible moyenne forte faible moyenne forte
1

2

3

4

18

9

6

4

23

16

13

11

25

22

18

16

27

18

11

6

30

20

16

13

27

23

18

16

36

22

18

11

27

24

18

16

31

25

18

16


Le dimensionnement en pratique

Température dans les locaux non chauffés

En outre, lorsque le volume chauffé n’est par directement en contact avec l’extérieur, la norme propose de calculer une température équivalente dans le local adjacent à celui-ci. Ce calcul est quelque peu fastidieux. Il en va de même pour le calcul de la température du sol. Dès lors, on peut simplifier la démarche en utilisant les ordres de grandeur suivants :

Estimation des températures équivalentes dans les locaux non chauffés :
En rouge : surface de déperdition et température de consigne choisie dans le volume chauffé.
En bleu : température à considérer du côté “extérieur” de la surface déperditive.

Calculs

Pour estimer les déperditions de votre bâtiment et  pour estimer la puissance de votre chaudière.  Evitez d’utiliser ces outils comme des “boîtes noires”, ces résultats sont intéressant à confronter au dimensionnement exact effectué par l’auteur de projet. Pour utiliser ce programme, il est nécessaire de connaître le coefficient de transmission thermique (kj ou Uj) des différentes parois extérieures du bâtiment. En première approximation, une liste de parois types est reprise dans le programme de calcul.

 

Calculs

 Pour les murs et les toitures, le coefficient de transmission thermique (kj ou Uj) peut être calculé précisément.