Types de cellules


Préambule : les technologies photovoltaïques dans le contexte de la chaleur décarbonée

Dans le cadre de notre dossier sur la chaleur décarbonée dans les bâtiments existants, il est essentiel d’aborder le rôle croissant des technologies photovoltaïques. Si ces dernières sont traditionnellement associées à la production d’électricité, leur intégration dans les stratégies de décarbonation de la chaleur devient de plus en plus pertinente pour plusieurs raisons :
1. Couplage avec les pompes à chaleur : L’électricité produite par les panneaux photovoltaïques peut alimenter directement des pompes à chaleur, créant ainsi un système de chauffage à très faible empreinte carbone. Cette synergie entre production électrique renouvelable et technologies de chauffage performantes représente une solution clé pour la décarbonation des bâtiments existants.
2. Systèmes PV-T (photovoltaïque-thermique) : Ces systèmes hybrides permettent de produire simultanément de l’électricité et de la chaleur, optimisant ainsi l’utilisation de la surface disponible et améliorant le rendement global du système. La chaleur récupérée peut être utilisée pour le chauffage des locaux ou la production d’eau chaude sanitaire.
3. Autoconsommation et communautés énergétiques : La production photovoltaïque locale, associée à des systèmes de stockage thermique ou électrique, permet d’optimiser l’utilisation de l’énergie renouvelable pour les besoins de chauffage, notamment dans le cadre de communautés énergétiques où la mutualisation des ressources améliore l’adéquation entre production et consommation.
4. Résilience énergétique : Dans un contexte de transition vers des systèmes de chauffage électrifiés (pompes à chaleur, résistances électriques), la production photovoltaïque locale renforce la résilience des bâtiments face aux fluctuations des prix de l’énergie et aux potentielles contraintes du réseau.
Comprendre les différentes technologies de cellules photovoltaïques, leurs performances, avantages et limites est donc fondamental pour concevoir des systèmes de chauffage décarbonés optimaux. Cet article présente un panorama des technologies existantes et émergentes, permettant aux professionnels de faire des choix éclairés en fonction des spécificités de chaque projet de rénovation énergétique.
Les évolutions technologiques rapides dans ce domaine, avec l’amélioration constante des rendements et la réduction des coûts, renforcent chaque année la pertinence du photovoltaïque comme composante d’une stratégie globale de décarbonation de la chaleur dans les bâtiments existants.

Introduction

Une cellule photovoltaïque est un composant électronique qui lorsqu’il est exposé au spectre solaire génère une tension électrique par effet photovoltaïque.

Toutes les cellules sont créées à partir de matériaux semi-conducteurs. La plupart du temps, c’est le silicium (Si) qui est utilisé mais on rencontre aussi le sulfure de cadmium (CdS), le tellure de cadmium (CdTE), des alliages de cuivre indium et sélénium (CIS),…

Trois technologies principales de cellules existent suivant leur mode de production :


1ère génération : cellules cristallines

Ces cellules, généralement en silicium, ne comprennent qu’une seule jonction p-n. La technique de fabrication de ces cellules, basée sur la production de “wafers” à partir d’un silicium très pure, reste très énergivore et coûteuse. La limite théorique de rendement de ce type de cellule est de ±27%. Les cellules les plus récentes s’approchent chaque année de plus en plus de cette limite.

Méthode de fabrication : le cristal formé par refroidissement du silicium en fusion dans des creusets parallélépipédiques est ensuite découpé en fines tranches appelées “wafers”. Les cellules sont alors obtenues après “dopage” et traitement de surface.

On distingue deux types de cellules cristallines :

Les cellules polycristallines

Photo cellules polycristallines.

Le refroidissement du silicium en fusion est effectué dans des creusets parallélépipédiques à fond plat. Par cette technique, des cristaux orientés de manière irrégulière se forment. Cela donne l’aspect caractéristique de ces cellules bleutées présentant des motifs générés par les cristaux.

Rendement

17 – 19% (On obtient ainsi une puissance de 170 à 190 Wc par m²)
Ces cellules, autrefois dominantes sur le marché, sont progressivement remplacées par les technologies monocristallines plus performantes, notamment de type n (Source: Agrivoltis, 2025).

Avantage

  • Rapport performance/prix – Coût de fabrication réduit.

Inconvénient

  • Rendement inférieur aux technologies monocristallines modernes.
  • Part de marché en diminution.

Les cellules monocristallines

Photo cellules monocristallines.

Ces cellules sont constituées de cristaux très purs obtenus par un contrôle strict et progressif du refroidissement du silicium. Elles dominent désormais le marché.

Rendement

Le marché a considérablement évolué avec plusieurs générations technologiques :
Cellules Al-BSF (aluminium back surface field) : technologie traditionnelle, rendement 18-20%
Cellules PERC (passivated emitter and rear cell) : technologie dominante jusqu’en 2023, rendement 21-22%
Cellules TOPCon (tunnel oxide passivated contact) : technologie en forte croissance, rendement 22-23%
Cellules HJT (hétérojonction) : technologie premium, rendement 23-24%
Cellules IBC (interdigitated back contact) : technologie haut de gamme, rendement jusqu’à 24%
En janvier 2025, Trina Solar a établi un record mondial de 25,44% de rendement pour un module solaire à hétérojonction de type n (Source: PV Magazine, janvier 2025).

Avantage

  • Rendements élevés et en constante progression
  • Meilleure performance à haute température
  • Durée de vie allongée (30+ ans pour les technologies récentes)

Inconvénients

  • Coût plus élevé pour les technologies les plus avancées (HJT, IBC)
  • Processus de fabrication plus complexe

2ème génération : couches minces “thin films”

Photo cellule couches minces "thin films".

Dans le cas de “couches minces”, le semi conducteur est directement déposé par vaporisation sur un matériau support (du verre par exemple). Le silicium amorphe (a-Si) (silicium non cristallisé de couleur gris foncé), le tellurure de cadmium (CdTe), le disélénium de cuivre indium (CIS) font notamment partie de cette génération. Ce sont des cellules de cette technologie que l’on retrouve dans les montres, calculatrices,… dites solaires !

Le silicium amorphe

Rendement

6 à 8% soit 60-80 Wc/m².

Avantages

  • Moins coûteux que la première génération puisqu’elle consomme moins de matériau semi-conducteur.
  • Moins polluant à la fabrication (ne nécessite pas de passer par l’étape de transformation du silicium en “wafers”).
  • Fonctionne avec éclairement faible et diffus.
  • Moins sensible à l’ombrage et aux élévations de température.
  • Possibilité de créer des panneaux souples et semi-transparents.
  • Panneaux légers adaptés à l’intégration architecturale.

Inconvénients

  • Rendement global plus faible.
  • Diminution de performance avec le temps plus importante (effet Staebler-Wronski).
  • Part de marché très réduite face aux technologies cristallines.

Le tellure de Cadnium, Disélénium de cuivre indium (avec ou sans Gallium)

Il existe d’autres types de cellules “couches minces” : tellurure de cadmium (CdTe), le disélénium de cuivre indium (CIS),…

Le CdTe présente de bonnes performances, mais la toxicité du cadmium reste problématique pour sa production.

Rendement

CdTe : 18-19% en production commerciale. First Solar, leader de cette technologie, a annoncé en 2024 des modules avec des rendements de 19,5%.
CIGS : 17-18% en production commerciale. En laboratoire, les cellules CIGS ont atteint des rendements de 23,4% en 2024.
Ces technologies ont connu des progrès significatifs ces dernières années, réduisant l’écart avec les technologies cristallines (Source: PV Magazine, 2024).

Avantages

  • Fonctionnent avec éclairement faible.
  • Moins sensible à l’ombrage et aux élévations de température.
  • Possibilité de créer des panneaux souples.
  • Panneaux légers.

Inconvénients

  • Rendement global plus faible en ce qui concerne les cellules commercialisées.
  • Rendement moindre sous éclairement direct.
  • Diminution de performance avec le temps plus importante.
  • Durée de vie moins grande que les cellules cristallines.

3ème génération : Perovskites, multijonction, concentration, …

Pour améliorer les rendements des cellules, la recherche se tourne actuellement vers plusieurs pistes dont notamment :

  • Les Cellules Pérovskites sont des cellules composées d’un élément hybride organique-inorganique ayant une structure de pérovskite.

Schéma cellules Pérovskites.

  • Ces cellules sont apparues en 2000 avec un rendement de 3,8 %. Depuis, en 2016, le rendement est passé à 22,1 % ce qui en fait une alternative prometteuse ! Leur coût de production est faible. L’inconvénient de ces cellules réside dans leur instabilité et faible résistance aux agents extérieurs (eau, températures…). Néanmoins bon nombre de recherches prometteuses sont en cours et devraient finir de rendre ce type de cellules rapidement intéressantes.
  • Cellules multicouches : superposition de multiples cellules aux propriétés différentes (utilisant des bandes d’énergie différentes permettant un balayage plus large du spectre solaire). Ce type de cellules est déjà commercialisé, mais principalement pour des applications spatiales. Les rendements obtenus sous concentration sont très prometteurs (au délà de 30 %)..

    Schéma cellules multicouches.

      1. Sunlight spectrum ;
      2. Tunnel junctions ;
      3. Cell 1, cell 2, cell 3.

    Structure d’une cellule triple-jonction.

  • Cellules à concentration (permet d’utiliser des photons à basse énergie qui ne sont habituellement pas absorbés par la cellule).
  • Cellules organiques,…

Évolution des rendements et stabilité

2000 : rendement initial de 3,8%
2016 : rendement de 22,1%
2025 : rendement record de 25,7% en laboratoire pour des cellules simples
La stabilité, principal obstacle à leur commercialisation, a connu des progrès majeurs. En janvier 2025, une étude en conditions réelles sur 2 ans a montré une stabilité record de modules photovoltaïques pérovskites avec un maintien de plus de 95% des performances initiales (Source: L’Usine Nouvelle, janvier 2025).

Autres technologies émergentes

Cellules à concentration (CPV) : utilisent des systèmes optiques pour concentrer la lumière solaire sur de petites cellules à haut rendement, atteignant jusqu’à 40% d’efficacité. Principalement utilisées dans les régions à fort ensoleillement direct.
Cellules organiques (OPV) : basées sur des polymères conducteurs, offrent flexibilité et semi-transparence avec des rendements atteignant 18% en 2025. Applications principales dans l’intégration au bâti et les objets connectés.
Cellules à points quantiques : permettent de moduler précisément les propriétés d’absorption de la lumière, avec des recherches prometteuses pour dépasser les limites théoriques des cellules à jonction simple.


Conclusion

  • Les cellules cristallines à jonction simple se rapprochent de leur performance ultime théorique (± 27 %).
  • Les TF-PV (ThinFilm PV) s’améliorent très rapidement et commencent à concurrencer les cellules cristallines en terme de rendement.
  • Les Cellules à Perovskites sont un nouveau matériau plein de potentie.
  • Les Tandems Silicones-Cristallins semblent être la voie à suivre pour atteindre des rendements supérieurs à 30 % à faible coûts.
    [imec]

Courtesy of M. Hermle, Fraunhofer ISE.

Implications pour les systèmes de chaleur décarbonée

Dans le contexte de la décarbonation de la chaleur, ces avancées technologiques offrent des opportunités significatives :
1. Rendements accrus : L’augmentation des rendements permet de produire plus d’électricité sur une surface donnée, optimisant l’alimentation des pompes à chaleur et autres systèmes de chauffage électriques.
2. Diversification des applications : Les technologies flexibles, légères ou semi-transparentes (CIGS, pérovskites, OPV) permettent d’intégrer le photovoltaïque sur des surfaces auparavant inutilisables des bâtiments existants.
3. Amélioration du bilan carbone : Les nouvelles technologies de fabrication réduisent l’empreinte carbone de production, améliorant le temps de retour énergétique et environnemental des installations couplées aux systèmes de chauffage.
4. Réduction des coûts : La baisse continue du coût du photovoltaïque renforce la viabilité économique des solutions de chauffage électriques alimentées par l’énergie solaire.
Ces évolutions technologiques contribuent à faire du photovoltaïque un pilier essentiel des stratégies de décarbonation de la chaleur dans les bâtiments existants, en synergie avec les pompes à chaleur, les systèmes de stockage et les réseaux intelligents.